Toulouse : la Dépêche attaquée par des meufs vénères

mai 1st, 2016 by e
sijavaisNues, ivres ou isolées, nous ne sommes pas des proies

Indy Nantes, vendredi 29 avril 2016 | Des meufs venères |

 

Dans la nuit du 28 au 29 avril, les locaux de la Dépèche Intéractive ont été attaqués.

La Dépèche n’est pas une forteresse inattaquable. Tous les grands groupes ont leurs faiblesses, à nous d’être inventives, rusées et suffisemment perspicaces pour les trouver. La Dépèche Intéractive est une branche du groupe La Dépèche. Cela suffit à nous en faire une cible.

Les raisons de nuire aux médias ne se comptent plus. C’est même un discours plutôt répandu chez celles et ceux qui ont compris que l’opinion publique ne sera jamais notre amie. Cette attaque est une réaction à la publication d’un article propageant l’idée que « nous, femmes » créons les conditions de nos agressions, en n’incarnant pas le modèle faconné par les désirs des hommes, qui nous veut silencieuses, soumises, obeissantes, et objet de consommation.

Les marteaux qui cette fois visent des vitres – comme ils pourraient viser des têtes – arment notre rage envers toutes celles et ceux qui renforce la culture du viol. Cette action est une foulée de plus dans le chemin sans fin de notre libération de toutes les oppressions. Nous ne le repeterons visiblement jamais assez, le viol n’est pas l’acte isolé d’un dangereux individu qui guetterait au coin d’une ruelle, mais bien, sinon une arme, souvent la menace et la punition corrective pour toutes les meufs qui ont fait de la rebellion leur vie ou simplement cherchent à sortir de la cage qu’est le patriarcat. Et c’est toujours le reflet d’un monde qui envisage les femmes comme des objets à soumettre.

Les medias nous instrumentalisent pour distiller la peur, en creant un besoin de sécurité auquel il faudrait répondre, dans l’urgence, par toujours plus de contrôle sur nos vies, de cameras, de relevés ADN. Illes ne cherchent pas à nous protéger, ce discours est un leurre pour augmenter leur domination.
Nous ne voulons pas déleguer notre protection, mais essayons de nous organiser pour nous defendre, et attaquer est une façon de le faire.

Sous entendre, comme le fait Jean Cohadon dans son article, que l’alcool et la drogue sont des problèmes récurrents chez les meufs qui ne peuvent être dissociés des viols et autres agressions dont elles font l’objet, c’est tenir leurs jambes écartées pendant que les bourreaux font leurs affaires. Ce journaleux médiocre, passionné de faits divers et d’intervention policières et un des milliers de complices impuni.e.s auxquel.le.s personne ne songe, ou n’ose, s’attaquer. La Dépèche, publiant son article dans leur torchon infâme, en est une autre.

Nous nous organisons, entre meufs, pour qu’un jour nous ne nous en prenions plus seulement à des vitres et à des murs mais bien aux gens et gentes qui se cachent derrière, et qui sont celles et ceux qui font l’objet de notre haine. Nous voulons qu’illes aient peur, qu’illes sachent que leurs agissement ne resteront pas toujours sans réponse. Nous voulons qu’illes pensent à toutes ces meufs vénères qui les guettent au coin d’une ruelle, et qui rêvent d’un jour leur enfoncer un marteau dans le coeur. Illes veulent nous rendre responsble des horreurs qu’ils nous font subir, nous voulons que la peur change de camp.

Cette action est dédiée à toutes les meufs énervées, nous esperons par là chauffer vos coeurs.

Que les actions contre le patriarcat se multiplient !

A vos marteaux… Prêtes ? Partez !

communiqué trouvé ici

Face au viol: lutter contre le sexisme, lutter contre l’Etat

avril 12th, 2016 by e

Le texte qui suit est extrait du numéro 6 d’un  journal d’agitation, « Paris sous tension », trouvable ici et publié en mars 2016.


« Si tu te faisais violer tu serais bien contente de pouvoir porter plainte, non ? » Voilà le genre de phrase que j’ai pu entendre à plusieurs reprises dans des discussions où j’expliquais à des mecs que je rêve d’un monde sans flics. Même registre quand parfois j’ai exprimé mon dégoût profond de la prison : « Et qu’est-ce que tu ferais des violeurs alors ? »

Il semblerait que quand il s’agit de justifier ce monde sécuritaire certains commencent subitement à s’intéresser aux oppressions sexistes. S’ils s’étaient vraiment penchés sur la question, peut-être auraient-ils remarqué que les flics n’en ont pas grand-chose à foutre des plaintes pour viol. Que les juges se comportent différemment en fonction du statut social de l’agresseur. Que les flics et la justice, apparemment si nécessaires pour nous protéger, sont les mêmes qui enferment celles qui ont rendu les coups face à un mari violent.
Si vraiment les violences faites aux femmes étaient un sujet d’inquiétude pour eux, sûrement auraient-ils remarqué que ce système qui génère des flics et des taules pour «nous protéger des violeurs» est lui-même structurellement sexiste.

Les représentations véhiculées par la pub, les médias, la médecine, l’école, la culture, nous répartissent dans deux identités de genre que nous n’avons pas choisies et auxquelles nous sommes assigné-e-s, dont l’une domine l’autre. Au moment où, nourrissons, on nous a mis un bracelet rose autour du poignet, notre place dans la société a été déterminée comme femmes, séductrices hétérosexuelles et mères attention-nées au service des hommes. Désormais on peut aussi travailler si on veut, pour un salaire presque comparable à celui d’un homme, mais notre rôle principal dans la société reste d’enfanter la relève. Il suffit de s’intéresser aux conditions d’accès à l’avortement ou à la stérilisation pour s’en faire une idée. Ou encore à la stigmatisation de ceux et celles qui ne rentrent pas dans les cases. L’Etat, qui voudrait soi-disant assurer notre sécurité, participe au maintien d’un système hétéro-patriarcal, en gros un monde où les relations entre sexes reposent sur l’hétérosexualité et l’autorité masculine.

En posant la femme comme objet sexuel de l’homme, cette domination générale représente un terreau propice au viol, le rendant même acceptable dans la plupart de ses formes. La majorité des viols et des agressions sexistes est d’ailleurs commise au sein des schémas encouragés par l’Etat : le couple et la famille.

Alors il y a en a vraiment marre en tant que femme d’être instrumentalisée pour justifier des discours et des politiques répressives et sécuritaires. Après avoir été mis en place initialement pour lutter contre les crimes sexuels, le fichage ADN est désormais couramment utilisé dans des procédures judiciaires variées. La RATP fait la pub de ses caméras et agents de sécurité dans une campagne récente contre le harcèlement dans les transports. En Allemagne, des agressions sexuelles commises à Cologne par des migrants sans papiers le soir du nouvel an sont venues alimenter le racisme et justifier les politiques (anti-)migratoires. Là-bas comme ici, le pouvoir ne cherche pas à défendre les femmes des agressions sexistes mais à défendre sa propre souveraineté sur les femmes. Dans notre «civilisation occidentale» comme dans bien d’autres, la femme a toujours été un territoire, un butin de guerre à coloniser par le viol et l’esclavage domestique tout autant qu’à protéger des ennemis.

Alors, non merci, je ne recherche pas la protection de ceux-là même qui font tout pour me maintenir en position de dépendance. Ni celle des machos, ni celle de l’Etat. Et si jamais un jour, forcée par ce monde à choisir entre ma sécurité et mes convictions, je me retrouve à appeler les flics, je sais que je risque de subir en prime leur sexisme et leur répression. Alors je recherche plutôt des moyens de sortir de la dépendance, de reprendre ma vie en main. Je cherche de nouvelles manières de me construire comme individu, de me relationner avec celles et ceux qui m’entourent. Je cherche des allié-e-s, des outils, des connaissances, des savoir-faire pour sortir de l’isolement et être capable de m’auto-défendre, mettre des mots sur ce qui m’oppresse et organiser la riposte. Et quoi qu’il arrive, je ne perdrai pas de vue que combattre le sexisme n’est pas dissociable d’un combat contre toutes les autres dominations portées par l’Etat et le capitalisme. Qu’on ne pourra expérimenter la liberté qu’une fois qu’on se sera débarassé-e-s de toutes les prisons, celles en dur et celles dans nos têtes.

 

[affiche] T’en as marre?

mars 2nd, 2016 by e

pascontentE

T’en as marre???  

Que les mecs te matent comme un objet, qu’ils se permettent des commentaires sur ton look, ton corps, qu’ils se moquent de toi ou te harcellent, te traitent comme de la merde parce que t’es une fille?

De devoir  ressembler à une star de cinéma pour être populaire, d’être toujours sûr de toi, de cacher tes émotions, de savoir que si tu te conformes pas au modèle du « vrai mec », du  bon hétéro macho fier d’écraser les autres tu feras partie des « cibles »  (moqueries, coups, menaces…homophobie puante).

De devoir t’habiller à la mode et ressembler  à une publicité, de mater des films débiles, d’apprendre l’amour dans des magazines stupides, de servir de faire valoir aux garçons et de rire à leurs blagues sexistes pour qu’ils te foutent la paix?

De te réveiller tous les matins pour être enferméE toute la journée avec des profs, des « supérieurEs »  qui savent tout mieux que toi; de t’enfoncer dans le crâne des conneries qui t’empêchent de penser, et tout ça pour devenir un esclave de plus de cette société basée sur l’exploitation et la domination?

De croire que pour réussir ta vie il te faut un bon métier, te marier, avoir des enfants et des tas de gadgets, même si tu dois te taper le patron, te prendre des coups, faire abstraction de tes envies?

T’es FURAX qu’on utilise la menace du viol pour t’obliger à « marcher droit » et à rester à ta « place de fille » sans jamais te dire que le type qui viole est rarement un inconnu (et que c’est aussi ça qui complique le fait de se défendre). Sans jamais te dire que la personne responsable n’est JAMAIS la personne qui a subi le viol, sans t’apprendre à te défendre ni t’encourager (t’aider) à trouver tes moyens d’y survivre et d’y répondre?

Tu n’es pas le seul, la seule ! 

Refusons de reproduire et détruisons les distinctions et les hiérarchies imposées entre hommes, femmes, intersexes ou trans  (…), hétéros et homos: nous ne sommes pas réductibles à nos spécificités physiques, à nos (non) sexualités.  De 1001 manières, attaquons-nous à ce(ux) qui voudrai(en)t nous éduquer, nous (ré)insérer, amputer nos individualités foisonnantes pour les faire rentrer dans les cases de cette société triste à pleurer, pour les soumettre aux lois de la morale, de l’État et du capital.


Leur monde est une prison…  Rasons-la !

tenamarre

A propos du procès de Jacqueline Sauvage…

décembre 25th, 2015 by e

beeld28« C’était une Rebellion »

Début décembre 2015 se tenait le procès en appel de Jacqueline Sauvage,condamnée à 10 ans de prison pour le meurtre de son mari, le sinistre Norbert Marot, fin 2012. À l’issue de plusieurs jours d’audience, la cour d’appel de Blois (loir-et-cher) a confirmé la peine prononcée en première instance…

Crève la justice et son minable avocat général, Frédéric CHEVALLIER qui a osé déclarer que Mme Sauvage aurait dû « répondre de manière proportionnée » à la dernière violence subie : « un coup de poing ayant occasionné moins de trois jours d’Incapacité totale de travail» quand ce sont des décennies d’humiliations, de viols, de menaces, chantages, tabassages (…) qui ont été décrites par l’accusée, plusieurs de ses filles et d’autres membres de l’entourage .

… Cette crapule de première, qui s’est permis de plaider contre la situation de « légitime défense » que la justice sort de son chapeau quand il s’agit de disculper le gérant d’un commerce qui a abattu un braqueur ou couvrir un énième meurtre policier.

… Qui, drapé dans ses principes puants a dit « La peine infligée à Jacqueline Sauvage ne doit pas être un permis de tuer ».

Mais de quoi parle-t-on ??? La femme qui comparaît a passé cinquante ans de sa vie enfermée dans ce couple, et elle a fini par tuer son geôlier dans un geste de survie, de libération. Il n’y a personne pour venir raconter au tribunal que Norbert Marot était un « brave mec », ni pour nier ce qu’il avait fait vivre à ses proches, au contraire. Un sale type un vrai. Dans cette situation terrible qui aurait pu être « simple » à comprendre, même pour le dernier des magistrats, les deux filles qui sont venues témoigner s’en prennent plein la gueule. Parce qu’elles ont survécu à leur père comme elles ont pu (en fuguant, en coupant les ponts…) et tenté de venir en aide à leur mère (en lui permettant de s’enfuir de la cellule conjugale…) mais qu’elles n’ont pas porté plainte, elles sont considérées comme suspectes et fautives aux yeux du tribunal.

Les charognes en toge ne comprennent apparemment pas que face à un type dangereux, armé et leur ayant déjà fait subir mille misères, que face à l’absence de soutien ou d’aide concrète de l’entourage, elles aient eu peur des représailles, peur de mourir et que cette peur ait pu les faire taire. L’infâme présidente s’adresse à l’une d’elle en tentant de la faire culpabiliser : «C’est le malheur de votre mère que vous avez fait ». Ouais ouais, cause toujours !!! T’as qu’à dire qu’elles sont connes, toutes ces femmes qui se retrouvent piégées dans des couples toxiques, dans des familles où elles s’étiolent à petit feu sous toutes sortes de violences et d’humiliations (psychologiques ou physiques) quand elles ne meurent pas sous les coups de leur mari, comme c’est le cas pour une centaine de femmes tous les ans. Nous on se dit que LA responsabilité est toujours celle du type qui décide de faire de la merde, et que si autant de types se le permettent et qu’autant de femmes le subissent dans la honte, le silence voire l’indifférence générale, c’est parce que ces saloperies s’inscrivent dans une société _justice comprise_qui est basée entre autres choses sur l’oppression des femmes. On ose à peine imaginer la condamnation, les horreurs dites par le tribunal s’il s’était agi d’un personnage plus « subtil », d’un notable quelconque [politicien, docteur, homme de loi, scientifique, patron d’une entreprise prospère…], en tout état de cause d’un type passant pour «ordinaire, banal, respectable», mimant le « bon père de famille » et entouré de personnes-qui-ne-croient-pas-une-seule-seconde-qu’il-ait-pu-faire-du-mal-à-une-mouche.

La juge leur reproche de ne pas avoir fait appel d’elles-mêmes à la justice qui prétend se placer en arbitre au-dessus des conflits entre les individus, départager les innocents des coupables et décerner à certain-es le statut de victimes à qui donner réparation. Comme s’il pouvait y avoir une réparation pour un viol, ou le meurtre de quelqu’un-e qu’on aime. Comme si l’enfermement (réponse déléguée à l’État), ou même la vengeance (que l’on décide de renvoyer soit-même à la tronche d’un agresseur) pouvaient alléger/réparer quoi que ce soit. Non seulement Jacqueline Sauvage n’a pas été la victime que l’on attendait qu’elle soit mais en tuant son mari elle est sortie du rôle de femme-passive que l’État-papa prétend protéger à grand renfort de mesures sécuritaires (fichage toujours plus généralisé de la population, caméras à tous les coins de rue, bracelets électroniques… par ailleurs la recherche d’individus suspectés de violences sexuelles a permis à l’état de demander et banaliser la coopération des citoyen-nes avec sa police, par le biais d’appels à la délation qui se sont étendus progressivement au restant des délits). Peu importent les raisons qui ont poussé Jacqueline Sauvage à bout: la seule violence acceptable aux yeux de la justice est la sienne, qui n’est qu’une partie de celle que l’État exerce continuellement pour se maintenir en place. Opérations militaires, milliers de mort-es aux frontières, enfermement toujours plus massif, mort-es dans les taules, les commissariats, les hôpitaux psychiatriques, mises sous camisole chimique…

La juge, cyniquement, reproche à Jacqueline Sauvage et à ses deux filles de ne pas avoir eu recours à la justice qui, sans aucune surprise, les infantilise/humilie/nie aujourd’hui, de ne pas être allées déballer leurs sacs de peurs, de souffrances et d’humiliations devant le premier flic venu (puis une blouse blanche, puis… puis…) puis devant un tribunal composé de dignes représentant-es du monde dans lequel nous vivons, un monde où le consentement, les désirs, la vie des femmes ne vaut pas grand chose, et leur parole encore moins. Où il est globalement admis que les hommes ne sont que les victimes de désirs « irrépressibles » tandis que les femmes sont immédiatement soupçonnées de « l’avoir bien cherché » (« après tout qu’est-ce qu’elles croyaient en traînant dehors à cette heure-ci, en tapinant, en faisant du stop, en étant habillée comme-ci ou comme-ça ?») et que ce qui se passe à l’intérieur de la famille/du couple est une affaire strictement privée. Ce monde post-68 donne à ceux qui le veulent bien l’illusion que les femmes ont « été libérées » tandis que le sexisme, insidieusement transformé, continue à structurer la société, que les rapports de domination sont omniprésents et confèrent un pouvoir forcément nocif au « chef de famille », celui-ci ne manquant pas de rappeler « qui c’est qui commande ici ». Dans ce « meilleur des mondes », sur fond de morale religieuse/patriarcale tous les rouages sociaux (parents, curetons de tous poils, éducateurs, psy, instits, publicitaires…) s’acharnent à amputer les individualités jusqu’à modeler des petits garçons ou des petites filles (combien de fois on entend dire que « les hommes ne pleurent pas» ?). Dès le plus jeune âge, on inculque à tous-tes l’obéissance et la soumission (gare aux rebelles, la répression est féroce) et aux petites filles la certitude d’être «fragiles», la culpabilité, la honte de leur sexualité, la peur du viol comme traumatisme indépassable plutôt que de leur apprendre à se défendre et à y survivre, plutôt que de les encourager à prendre confiance dans leurs forces, à se considérer comme des individus autonomes et au centre de leurs propres vies. Cette société morbide prétend dicter à chacun-e ce qu’il ou elle ou… doit faire de son cul et le contrôle du corps des femmes (contraception/reproduction…) y reste un enjeu crucial de gestion de population, de maintien de la structure sociale. C’est aussi une garantie de stabilité pour le pouvoir qui préfère les femmes enfermées au sein de la famille puis du couple (hétérosexuel de préférence) quite à y subir les pires saloperies (la plupart des viols ont lieu dans ce cadre-là) qu’inventant leurs propres chemins…

Le pouvoir de tous ces petits despotes (mari, médecin, patron…) est aussi tissé de nos silences. Il est plus que temps de jeter sur la table nos histoires de femmes, des histoires en luttes, et des ressources pour s’extirper (chacune à sa manière, ensemble) de tout ce merdier.

On l’imagine s’étrangler sur son trône, la juge, quand l’accusée, non contente d’avoir survécu, de s’être débarrassée de celui qui lui pourrissait la vie, a affirmé « C’était une rébellion ». Elles ne sont pas là pour reconnaître la dignité ni la nécessité d’une révolte, ces magistrales crapules, et ces juré-es, idiot-es utiles mais ô combien nécessaires au fonctionnement de ce tribunal sordide. Ils et elles sont là pour faire des calculs d’apothicaires, en petites mains de justice bien planquées derrière leur code pénal, pour transformer des conflits, des situations toujours uniques en chefs d’inculpations, en circonstances aggravantes ou atténuantes, en éléments de preuves, en délits, puis en reconnaissance de culpabilité ou plus rarement d’innocence et en peines de prison.

Aujourd’hui de belles âmes citoyennes s’indignent et s’émeuvent de la condamnation, réduisant cette situation à un « symbole » au nom duquel demander la grâce présidentielle. Elles viennent contester la désignation de Jacqueline Sauvage comme coupable (qui fait de Norbert Marot la victime) pour demander qu’elle soit reconnue comme victime (faisant de Norbert Marot le coupable à titre posthume) et contribuent à alimenter le rêve réformiste d’une justice plus juste, d’une société aux rapports de domination plus policés, acceptables. Peut-être que pour se faire un coup de pub auprès de cet électorat progressiste, la grâce (il est parlant ce mot religieux) sera finalement accordée à Jacqueline Sauvage, et que celle-ci pourra vivre un peu, enfin.

Contrairement à ces dernières nous refusons de dialoguer avec un pouvoir qui nous dépossède jour après jour de nos vies en prétendant en codifier tous les aspects (soi-disant en notre nom et pour notre bien). Contrairement à tous ceux qui voudraient négocier la longueur de leurs chaînes, nous pensons qu’il n’y a aucune liberté possible à l’ombre d’une prison ni sous l’égide d’une puissance supérieure (Dieu, État…).

Assez de sexisme intégré, de faux-semblants. Si on ne parle pas de ce qui nous pourrit la vie, à quoi bon parler ?

Assez de larmes, de plaintes, de demandes de « réparation ». Assez de délégation, d’expertes, de « spécialistes » . Nous sommes les mieux placées pour nous réparer. Finies la honte, la culpabilité : place à la colère! Ce n’est certainement pas en se représentant à nous-même comme des (potentielles) victimes à protéger que nous trouverons les ressources pour combattre tout ce qui nous opresse au quotidien. il nous faut détruire l’idée même de justice si nous voulons avoir une chance d’être libres un jour, et apprendre à affronter dès aujourd’hui, à partir de notre cœur et de notre cerveau, de notre éthique et de nos expériences, les conflits/agressions qui entravent notre route.

 

Il n’y a de dignité que dans la révolte.

Pour vivre, et non plus survivre, Passons à l’assaut de tout ce(ux) qui voudrai(en)t nous mettre à genoux.

LIBERTÉ!

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(tract diffusé dans les rues de Marseille… décembre 2015)

Barcelone : Ni Dieu ni maître, ni Mari ni Parti !

février 14th, 2014 by e

ni-ni-ni-niBarcelone : Attaque contre la Fondation Vidal i Barraquer

La nuit dernière (du 9 au 10 février 2014) nous avons brisé toutes les vitres de la Fundación Vidal i Barraquer, dans le quartier de Sant Gervasi à Barcelone en raison de leur complicité avec la Conférence Épiscopale pour empêcher les avortements. Nous participons ainsi aux journées de lutte du féminisme autonome contre la nouvelle loi et pour l’avortement libre et gratuit.

Nous savons qu’une action n’impliquant que du verre brisé n’est pas en soi une révolution, mais la somme de tous les verres brisés cette semaine-ci et de toutes les actions qui viendront contre la nouvelle loi sont une expression évidente de la rage qui monte à l’encontre de tous ceux qui prétendent décider de nos corps, que ce soient les partis politiques, l’Eglise ou quelque autre institution du même genre.

La Fundación Vidal i Barraquer est une de ces institutions dites  » en faveur de la vie » incluse dans le Diocèse de la Conférence Épiscopale, et qui, sous couvert de « médiation » et de « soutien juridique », se charge de manipuler les femmes que lui envoie Pro Vie Catalogne, pour qu’elles n’avortent pas.

Son rôle fait partie du mécanisme d’oppression qui condamne de nombreuses femmes à être mères, alors qu’elles ne le désirent pas ou ne peuvent pas se le permettre. Leur idée de la famille perpétue le système patriarcal, ce même système qui provoque les abus contre des enfants et la soumission au macho, avec des conséquences dévastatrices et trop souvent la mort au bout… Pro-Vie ?

C’est pourquoi nous les ciblons, et des vitres brisées nous semblent une bonne forme d’expression. Désormais nous n’allons plus rester calmes.

Finie la paix sociale !
Pour la radicalisation et la généralisation des expressions de rage, y compris à partir du féminisme !
Pour la mort du patriarcat sous toutes ses formes !

La semaine de lutte n’a fait que commencer pour se transformer en cauchemar pour eux toute l’année.

Ni Dieu, Ni maître , Ni Etat, Ni Mari, Ni Parti !

[Traduit de l’espagnol d’Indy Barcelone, 10 feb 2014]


Barcelone : Attaque du local de « Familia Unida »

La semaine dernière, dans le cadre de l’appel ouvert à des actions lors d’une semaine de lutte en défense de l’avortement libre et sûr, un groupe de femmes, lesbiennes et trans a attaqué le local utilisé par « Familia Unida » situé Gran Vía de les Corts Catalanes nº 318.

Les différents cadenas de leur local ont été pétés, des slogans en faveur de l’avortement ont été tagués et leur enseigne a été remplie de peinture.

Entre autres horreurs, Familia Unida est connue pour tenter de « soigner » de « leur lesbianisme » les femmes et les lesbiennes du quartier de Sants (et tout le monde, en réalité…).

Du coup, à travers cette action symbolique, nous prétendons montrer notre refus le plus absolu de cette énième pièce du puzzle du système rétrograde, patriarcal et lesbophobe que nous voulons, et ferons tomber !

Contre leur oppression, action !
Si vous occupez nos corps, nous occuperons vos temples ! (ou vos locaux, ou…)

fdo. quelques unes des tant et tant féministes autonomes qui sont descendues dans la rue, et continueront de le faire de toutes les manières possibles contre ce système patriarcal, qui prétend maintenant nous refuser de décider de nos corps !

Avortement libre et gratuit !

[Traduit de l’espagnol d’Indy Barcelone, 13 feb 2014]


Barcelone : Attaque contre Radio Estel

Lors de cette semaine d’actions autonomes contre l’illégalisation de l’avortement, nous sommes sorties dans la rue pour ajouter notre expression de rage. Le jeudi 6 au matin, nous avons attaqué [8 vitres brisées] les bureaux de Radio Estel (radio de l’archevêché de Barcelone) et siège de la revue Catalunya Cristiana, au croisement des rues Puggarí et Comtes de Bell.lloc, dans le quartier de Sants.

Nous avons décidé d’agir contre cette radio parce qu’elle est un moyen de communication au service de la Conférence Episcopale, qui sous couvert d’information tente d’endoctriner et de manipuler avec « catéchisme », en défendant le modèle social patriarcal, misogyne et normatif contre lequel nous luttons. C’est pour cela qu’en défense de la lutte féministe et en auto-défense de nos vies, nos idées et nos propres corps, nous avons brisé les vitres et laissé un tag : “El meu cos, la meva decisio” [« Mon corps ma dé&cision », NdT].

Leur morale catholique pourrie nous débecte, au même titre que nous détestons l’Etat et ses artifices politiques et légalistes. Une fois de plus, le rapport entre les deux institutions, l’Eglise et l’Etat, pour maintenir leur autorité et leur pouvoir patriarcal, est évident. Ils veulent arracher notre autonomie, notre capacité de décision, de penser par nous-mêmes et d’agir en conséquence avec ce que nous avons besoin et ressentons. Le choix de ne pas être mère deviendra un luxe que seules les riches pourront se permettre ou un risque pour la santé et la vie de celles qui ne pourront pas se payer une clinique clandestine sûre.

Nous ne sommes pas disposées à permettre qu’ils tentent de nous posséder. Jamais nous n’accepterons qu’ils décident à notre place et nous continuerons de nous défendre contre tous ceux qui veulent nous contraindre à n’être que des reproductrices de leur système.

Ni Dieu, ni Etat, ni Mari
Mort au patriarcat

[Traduit de l’espagnol d’Indy Barcelone, 09 feb 2014]

Traque des putes à Paris…

décembre 1st, 2013 by e

ouroboros_2Ces dernières semaines les rafles de prostituées se sont multipliées sur les trottoirs de plusieurs arrondissements parisiens (13e/18e/19e/20e…). Gouvernement, médias et mairies préparaient le terrain depuis un moment. On se souvient du conseil d’arrondissement sur le thème de la « prostitution dans le bas Belleville » en février 20121 où le commissaire du 19è demandait aux habitants du quartier d’ aider la police à identifier les appartements servant aux passes. Sur la tribune à ses côtés, le président de l’association des commerçants chinois de Belleville 2 méritait une fois de plus son statut de crapule. Plusieurs zélés citoyens, que l’idée de pouvoir participer à la traque policière rendait frétillants, avaient essayé de donner des informations sur le champ, avant de se faire heureusement rembarrer.

Journée de traque à Belleville: les membres de la « communauté chinoise » marchent un peu plus vite. La nuée de pseudos-bobos compulsivement absorbée par ses achats de fin d’année, de commerçants légaux ou non, de clients potentiels refroidis par l’irruption des flics et de pauvres en goguette poursuit sa route quand elle n’applaudit pas des deux mains. Quand on a déjà intégré la transformation de la ville en parc vidéo-surveillé, que les provocations quotidiennes de la BST et consorts (BAC, correspondants de nuits, GPIS) ne nous font plus bondir, quand le harcèlement permanent visant à dégager les indésirables (pauvres…biffins, fraudeurs, sans-papiers) de ce centre commercial à ciel ouvert nous semble une évidence ou une fatalité, on est plus à une infamie près3. Cette nouvelle opération policière est passée d’autant plus inaperçue, dans la pacification ambiante,  que les keufs avaient une excuse toute faite : agir pour le bien de leurs proies. C’est vicelard, il fallait y penser. C’est pour « leur bien » qu’elles sont arrêtées, éventuellement expulsées. C’est pour « leur bien » que les appartements où elles travaillent sont perquisitionnés. C’est encore pour « leur bien » que la police détermine arbitrairement ou non, qui est proxénète et qui est « juste » exploité, procès et enfermement à la clé… C’était également pour « leur bien » que l’assemblée nationale votait il y a plusieurs mois une loi de pénalisation des clients4. L’enfer est pavé de bonnes intentions.

Pour celles et ceux qui veulent bien les croire, ces humanistes invoquent de « grands principes » inattaquables, en théorie. La lutte contre le trafic d’êtres humains et la marchandisation des corps, celle pour le droit des femmes.  L’idée sous-jacente est assez simple: soit tu es dans le camp des gentils: tu adhères à ces grands principes et tu délègues la «lutte» pour leur application aux spécialistes (l’état, ses humanitaires, ses législateurs, ses flics…) soit tu n’adhères pas à ces grands principes  ou tu refuses de déléguer quoi que ce soit à l’état et dans ce cas là tu fais automatiquement partie des méchants. Le très démocratique front commun du bien contre le mal (qui dépasse les clivages réels pour mettre ensemble des idées incompatibles) oublie la question des intérêts que les uns trouvent à préserver l’existant que les autres veulent détruire. Sous leurs enrobages humanistes, toutes ces hypocrites charognes  ne dénoncent évidemment que ce qui les arrange. Ils ne fustigent les trafics humains, la marchandisation des corps que pour mieux laisser le reste debout.

Quel sens ça a de s’attaquer au travail du sexe en laissant le salariat intact?

Dès qu’on enlève les lunettes de la morale religieuse qui considère que le corps des femmes est sacré, que la sexualité ne doit avoir lieu que dans le couple marié et pour la procréation,  on a du mal à comprendre pourquoi la transformation des corps en machines productives ou en bien de consommation, en marchandise5, ne pose problème que lorsqu’il s’agit de travail du sexe… (et des prostituées présentes dans les rues, les autres formes de prostitution « haut standing », moins visibles, étant mieux acceptées)…

Sans la morale religieuse, on a du mal à comprendre la diférence profonde entre la prostitution et les autres formes du salariat. C’est quoi, le salariat, à part une institution fondée sur la contrainte, sur la nécessité d’ avoir de la thune pour survivre dans ce monde? C’est quoi le salariat, à part l’échange du temps, de la santé et de l’intelligence des salariés contre les  miettes plus ou moins ridicules que le patron veut bien leur lâcher? À part un chantage qui tient par la menace (de la précarité, de la prison)? Chacun sait que s’il choisit de ne pas  travailler et de se servir dans l’étalage des richesses pour vivre,  il risque de se retrouver enfermé, et que sa vie ne vaut pas grand chose en regard de la défense de la propriété privée. De quoi maintenir le plus grand nombre dans le chemin du droit (travaille ou crève, travaille et crève). Le moins qu’on puisse en dire, c’est que le fait de se faire de la thune, de tirer bénéfices de la misère ou de la faiblesse d’autrui nous pose un grave problème. Regardons les choses en face: tout patron est proxénète, et l’état (qui tire de la thune de chaque contrat de travail légal (et exige même de prélever une dime sur « l’économie informelle ») est le plus grand de tous.  Les trafics d’êtres humains que ces faux critiques dénoncent mollement ne sont qu’une des conséquences de l’existence de frontières, et de tous les dispositifs qui rendent de plus en plus difficile leur traversée. Laissons-les avec leurs larmes de crocodiles.

Contrairement à ceux-là nous assumons n’avoir aucun intérêt dans la préservation ou la réformation de l’existant, et opposons à leur voie démocratique  la reprise en main de nos vies et de nos capacités d’action, la diffusion d’attaques non  médiées.  La destruction des frontières, du capital, de l’état et du patriarcat sont des préalables nécessaires à une réelle lutte contre la marchandisation des corps, contre les trafics d’être humains, et la destruction des catégories hommes et femmes. 

Opposant l’individu à la majorité,  l’éthique au droit et à la morale, la réciprocité et l’entraide à la compétition pour la survie, lançons nos forces et  nos intelligences à l’assaut de cet existant irrespirable. La tâche est vaste et incertaine mais qu’importe? Il y a plus d’aventure à vivre sur le chemin vers la liberté que dans ces vies mornes et vides de sens.

Détruisons ce qui nous détruit !

traquepute

(Texte pécho dans les rues de Paris en Décembre 2013 et trouvable également sur les Brèves du désordre)

1_ Mi-février 2012, un conseil de quartier du 19è arrondissement sert de tribune au commissaire du 19ème pour annoncer l’amplification de la traque aux travailleuses du sexe, notamment chinoises, dans le bas Belleville. À ses côtés également plusieurs crapules politiciennes et humanitaires.  2_  Association tristement connue pour avoir organisé une manifestation pour demander plus de sécurité en 2010, manif suite à laquelle, officiellement, la BST a été crée (celle là même qui s’est encore distinguée ces jours-ci). 3_  Mais au fait ça commence où, une vie de merde ?  4_ La traque des travailleuses du sexe et de leur clients, a pour conséquence de déplacer les zones de travail vers des endroits plus isolés, où les personnes sont potentiellement plus exposées tant aux violences des clients qu’au racket des flics.  5_ C’est quoi la pub ; a part une chosification ?

 

 

Affiche: Avis au séducteur

juillet 25th, 2013 by e

doigtAvis au séducteur (le trop-nombreux « relou de service »)

On était dans la rue, la tête ailleurs ou speed, en train de discuter ou seules, joyeuses, fatiguées ou en colère, forcément disponibles selon toi (puisque « sans mec »). Cela t’a suffi pour dire ce que tu pensais de notre physique, nous conseiller de « sourire un peu » (pour mieux nous vendre?) etc. Il aurait fallu tout interrompre pour s’intéresser à ton cas. Quand on n’a pas répondu suffisamment poliment ou vite à ton goût tu t’es montré menaçant. Sale type!

Ce n’est pas parce que je suis seule que je t’attends. Tes fantasmes dégoulinants ne me regardent pas.

On se papouillait dans la rue et je t’ai senti te raidir, à distance. Macho, religieux, kéké ordinaire, tu nous as identifié comme deux garçons qui s’aiment: une remise en cause insupportable de tes schémas étriqués. Regards lourds, insultes, menaces, coups: tu aurais voulu nous faire rentrer dans tes cases. On s’embrassait avec une copine et t’as osé demander dans un rire gras si on avait besoin d’un mec…  Sac-à-merde!

J’étais dans la rue à diffuser mes idées (distribuer des tracts, coller des affiches…). Il m’a fallu un petit temps pour comprendre que tu n’étais pas là pour discuter. L’envie d’en finir avec toute autorité, de passer à l’attaque de ce qui nous pourrit la vie…Tu n’en avais rien à carrer. Pour toi je n’étais pas une complice potentielle mais un morceau de viande. Tu n’as pas compris que je m’énerve. Comment aurais-je pu me sentir flattée?

De jour, de nuit, dehors ou chez moi, inconnu ou très proche, peu importe: tu t’es cherché plein d’excuses pour minimiser tes actes: tu as dit que j’étais la fautive, que je l’avais « bien cherché ». Après tout on était « en couple » et je dormais à tes côtés, il était tard, j’étais bourrée, je faisais du stop, j’étais habillée « provocante », j’étais en train de tapiner… Dans ton esprit tordu, ça justifiait le fait de m’imposer tes désirs, de te passer de mon consentement. Ordure!

Tu es le seul responsable de ce qui s’est passé. 

Je n’attends de protection de personne,
Je ne ferai pas appel à la justice, Prends garde à ma vengeance.

Je vais continuer à courir les rues, seule ou en bonne compagnie, de jour comme de nuit, habillée et me comportant selon mes désirs de subvertir cet existant mortifère. J’ai mieux à vivre, à faire, que de t’expliquer pourquoi tu es pénible, en quoi tes « compliments », tes conseils, ta surveillance, tes réflexions permanentes m’oppressent.

Comme tout ce(ux) qui voudrai(en)t m’empêcher
de vivre libre, tu risques de prendre des coups.

une allumeuse hermaphrodite

avisauséducteur2

Affiche: Je ne veux pas me marier

avril 1st, 2013 by e

appelpetitJE NE VEUX PAS ME MARIER. Je n’ai que faire de la reconnaissance de l’état. Je ne veux pas m’insérer dans cette société, ni participer à la reproduction du couple et de la famille, ces institutions qui servent si bien l’ordre existant. Signer un contrat devant la république ou régulariser mes amours devant un quelconque Dieu sont des idées qui me répugnent.

Je conchie tous ces fafs qui portent le drapeau de la famille et de la patrie, les serments des réacs de tous bords et culs-bénits de toutes religions. Je ne suivrai pas docilement le troupeau de ceux qui emménagent dans une vie sans saveur, bien rangée entre le boulot et le foyer. Je ne veux pas de cette misère affective et sexuelle, de ces rapports truqués où l’on finit par considérer l’autre comme une marchandise.

Je ne suis pas à la recherche d’une vie de bohème dans un ghetto pour gay. Mes désirs ne sont pas solubles dans la platitude des relations existantes. La norme est trop étroite. Le fossé entre ce qui existe et ce que j’ai envie de vivre est trop important pour pouvoir être franchi à coup de réformes.

Pour la destruction du genre, de tout ce qui fait de nous des hommes et des femmes, des homos et des hétéros, des dominés et des dominants.

Crève l’État et ses institutions, le couple, la famille et la religion !

[Affiche trouvée sur les murs de Paris, avril 2013]

jeneveuxpas

 

Brochure_ À propos de la réouverture des maisons closes

juillet 1st, 2012 by e

Wood-52a2ff8140c8684e10efa8f52248ebdbActrices pornos, escorts, dominas, masseuses, télé-opératrices du téléphone rose ou du minitel, hôtesses de bars, call-girls, strip-teaseuses, prostituées travaillant chez elles, dans leur camionnettes ou dans les bois… Il y a autant de situations, de parcours individuels que de « travailleuses du sexe », « putes », « filles de joie », « fleurs du bitume », « courtisanes ».

Sont incluses dans la dénomination (et la féminisation) du terme « pute » toutes les femmes, hommes « bio » et transsexuel-le-s, personnes intersexes et hermaphrodites, etc. qui exercent cette activité. Putes plutôt que  » prostituées «  ou « travailleuses du sexe « , formulations qui insistent sur le fait que les personnes sont passives/victimes ou travailleuses comme les autres. Je vois un intérêt à incarner une des positions sociales les plus méprisées pour refuser le statut de victime automatique, et porter des positions féministes dont le refus de la sacralisation du sexe, le questionnement du couple, etc. J’ai parfaitement conscience qu’il ne suffit pas d’avoir en commun le fait de pratiquer du sexe contre de la thune pour partager des affinités. Le fait de se reconnaître « pute » et de ne pas avoir envie de s’insérer dans le monde du travail ni dans cette société de façon plus large pourraient être, selon moi, des points de départ minimaux pour une rencontre.

Prostitution choisie / subie

La prostitution dont parlent tant les défenseurs de l’ordre moral, est un des visages de l’exploitation subie par toutes celles et ceux qui sont fragilisés/maintenus en situation de survie par le système capitaliste. Cette situation concerne un grand nombre de personnes, françaises et étrangères, qu’elles et eux fonctionnent ou non avec un mac, sous pression de réseaux mafieux, dans le cadre d’une communauté qui parfois exige le remboursement du prix exorbitant d’un voyage ou pour obtenir de la came. C’est une des formes de l’exploitation dégueulasse que j’ai envie de combattre, ni plus ni moins. En tant qu’individu désireux de vivre dans un monde débarrassé de toute formes de dominations/ autorité, dont l’état et le capital, et non en preux chevalier (ou en citoyen défenseur du droit) venu sauver qui que ce soit.

Il y a aussi des personnes qui ont choisi d’échanger des services sexuels contre de la thune. Choisi pour autant que le fait de travailler puisse venir d’une volonté des individus et ne pas être dicté par la nécessité de se loger, d’avoir à bouffer… Des travailleuses indépendantes : sans mac, qui définissent elles-même leurs modalités de travail (pratiques, horaires, lieux, fréquence) en tentant parfois de créer avec d’autres des solidarités qui les rendent moins vulnérables. Contrairement aux fantasmes répandus, cette forme de prostitution concerne de nombreuses personnes, toutes nationalités confondues. C’est mon cas. Je suis escort, c’est-à-dire que j’ai une annonce internet qui me permet de rencontrer des clients, de façon intermittente. Quand j’ai du temps pour cela, en me donnant un certain nombre de critères qui permettent de sélectionner les passes et en refusant certaines rencontres avec des types que je ne sens pas. Je ne pense pas qu’une activité permettant la survie en termes économiques soit émancipatrice, même si son choix est déterminé par une réelle curiosité. S’il arrive qu’on y picore des choses qui nous permettent d’affiner des réflexions, ou de prendre confiance dans des capacités d’adaptations, ce sont sans doute des éléments qu’on aurait très bien pu trouver ailleurs, sans qu’il nous en coûte autant. Je ne suis pas arrivée par hasard à la putasserie, mais avec l’envie d’explorer mon corps et de continuer à faire mon mélange d’idées et de pratiques en lien avec l’anarchisme et le féminisme. Ce texte est issu pour partie de  discussions avec des copines, amies, compagnes de route ou inconnues rencontrées au détour de voyages qui avaient fait des choix similaires, ou non.

Voilà où j’en suis concernant ce que pourraient être des pistes de réflexions sur la ré-ouverture des maisons closes. Que le lecteur ou la lectrice qui viendrait ici chercher des vérités toutes faites ou un positionnement spectaculaire, éloge trépidant d’une prostitution émancipatrice, passe son chemin. Je ne ferai pas l’éloge du Travail.

Humanisme et sécurité intérieure

La députée UMP Brunel publie en 2010 une tribune dans « le monde » pour annoncer la possible réouverture des maisons closes, fermées officiellement depuis 1946 (et en pratique, depuis le début des années 1960). Michèle Barzach (1990), Françoise de Panafieu (2001) et Christine Boutin (2009) avaient elles aussi créé l’événement en lançant l’idée à leurs époques respectives. Cette fois, Chantal Brunel justifie sa proposition par le soi-disant échec de la Loi sur la Sécurité Intérieure ou LSI de 2003 concernant la prostitution. La députée déclare avoir voté cette loi en 2003 pensant que cela diminuerait le nombre de prostituées et propose que « soit mis à l’étude un cadre qui permettrait une réouverture minutieusement contrôlée des maisons closes (protection médicale, judiciaire, financière, cadre juridique…), tout en contrôlant par ailleurs l’achat de services sexuels ». Inutile de préciser que Brunel, comme les autres étayent leurs motivations par des arguments humanistes: mettre les putes « à l’abri des des agressions ». En arrière plan, l’idée que notre place en tant que prostituées, mais aussi en tant que filles, ne serait pas dans la rue mais dans des établissements où l’État se chargerait de notre sécurité… et on nous ressert une fois de plus le coup de l’État protecteur, qui veillerait à notre bien-être… bien malgré nous.

Les répercussions de la LSI

En théorie, la prostitution n’est pas illégale en France. Mais, dans les faits, la Loi sur la Sécurité Intérieure (LSI) de 2003 qui complète la réglementation sur le proxénétisme_[1] et réintroduit le délit de racolage passif_[2] a été une catastrophe pour les putes. La réintroduction de ce délit a parfaitement rempli ses objectifs en matière d’urbanisme. Les putes de rues ont été, comme plein d’autres populations pauvres dérangeantes, virées de nombreux centre-ville par des flics trop contents de pouvoir compter leur arrestation deux fois dans leurs quotas (dans les rubriques « affaire ouverte »et « affaire résolue »). Trop facile. Il en faut très peu pour justifier une interpellation, une mise en garde à vue (GAV), etc. Dans le cas des putes, le fait d’avoir plusieurs préservatifs sur soi (la base) caractérise le racolage passif. Les personnes qui bossent dans les bois_[3] avec des camionnettes ont aussi été concernées par cette intensification de la répression (procès verbaux, garde à vues, perquiz’). Certaines des putes contraintes de s’éloigner des villes pour se mettre à l’abri des flics ont été réduites à payer des gros bras pour assurer leur sécurité. Ce n’était pas forcément le cas pour celles qui avaient l’habitude de bosser à plusieurs ( « en ville ») en veillant les unes sur les autres. La pénalisation des clients aurait des conséquences similaires pour les putes.

La redéfinition et l’élargissement du délit de proxénétisme ont eu aussi d’énormes répercussions sur les conditions de vie dans et hors boulot. Sont considérés comme « proxénétisme » le fait de louer un appartement ou une camionnette à une pute qui s’en sert pour les passes, d’habiter sous le même toit sans pouvoir justifier de ressources suffisantes ou recevoir des cadeaux payés avec l’argent des passes (pour les enfants et les conjoint.es), de l’aider dans la fabrication de son site web (en étant rémunéré ou pas). Ces dispositifs fragilisent les putes sous prétexte de protection. L’objectif de la révision de cette loi ne serait-elle pas, entre autres, d’empêcher celles-ci de s’organiser entre elles et de gagner en autonomie? Un des exemples les plus frappant est la possibilité de poursuites légales contre des putes qui se feraient tourner des listes noires de clients violents, violeurs, mauvais payeurs, au prétexte qu’il s’agirait de « constitution de fichiers illégaux » et de « proxénétisme d’entraide ».

Évidemment ceci est une vaste hypocrisie et un frein considérable à l’autodéfense face à des connards capables d’arnaquer plusieurs filles, de leur faire des plans hallucinants et de s’en sortir toujours bien… Nous sommes quelques-unes à vouloir mettre en œuvre nos propres modalités de fonctionnement pour répondre à nos problèmes. Sans paternalisme de l’État ni médiateurs qui parlent en notre nom pour, en fait, légitimer leur position privilégiée. Nous sommes les mieux placées pour nous donner les moyens matériels et humains nous permettant de poursuivre notre activité dans les conditions qui conviennent – le mieux possible – à chacune. Nous voulons lutter contre l’État et une de ses logiques: gratifier celles et ceux qui adoptent le « bon »comportement, le comportement raisonnable qui répondrait à ce qu’il définit comme bon pour nous, et réprimer tout ce qui s’éloigne de ses critères.

A propos des maisons closes

Envers et contre toutes, les premières concernées sont souvent farouchement opposées à ces réouvertures. Certaines se souviennent des cadences infernales pratiquées dans les anciennes « maisons d’abattage » (cent clients par jour).

La situation des putes dans des pays frontaliers, comme la Suisse qui a adopté une politique « réglementariste » concernant la prostitution, ne fait pas plus envie. Les travailleuses du sexe « nationales » sont tenues de bosser dans ces établissements. Elles louent leur chambre, selon deux types de tarif: soit un pourcentage de leur recette quotidienne, soit un prix fixe à la journée. Elles récoltent au passage un patron à qui elles louent cher leur espace de travail. Tout ça dans une ambiance hyper concurrentielle et standardisée, avec une forte spécificité de chaque lieu (services proposés) à laquelle elles sont plus ou moins tenues de s’adapter. Alors que la loi suisse permet de créer des lieux qui seraient tenus par les putes elles-même, ils sont apparemment très peu nombreux, voire inexistants.

Certaines d’entre nous ont testé les bars « à hôtesses » qui sont, eux aussi, des espaces délimités et soumis aux contrôles tant vantés par Mme Brunel. Les résultats ne sont pas probants. Un retour au salariat dont nous cherchons à nous échapper: présence d’un patron, mec souvent, qui règne sur une équipe de filles, récupère un max de blé_[4] quand il n’exige pas un « droit de cuissage ». Le seul argent qui va sans intermédiaire du client à la fille est dans certains endroits afférent à ce qui peut se passer dans les « salons »[5]. Et encore, c’est souvent là que le gérant s’approprie la plus grande marge (encore plus importante que sur les verres vendus au bar), la convention tacite d’accès en « salon » étant l’achat d’une bouteille de champagne qui ouvre, selon le tarif, des durées « d’intimité » différentes. En théorie, les hôtesses seraient « libres » de choisir leurs horaires de travail, les clients avec qui elles vont passer du temps (ou pas), où (comptoir, salle, salon) et selon quelles modalités (tout ce qui concerne le contrat, implicite et explicite, ce qu’elles vont accepter ou pas d’un client, à quel moment, en public ou dans le salon).

En pratique les codes de fonctionnement d’une partie des bars sont défavorables aux personnes qui arriveraient quand elles veulent, ce qui pousse les hôtesses à faire le pied de grue pendant des heures au comptoir et tout ça sans savoir combien d’argent elles vont faire dans la la soirée [6]. Comme une bonne partie du business repose sur l’attractivité des « belles de nuit » que les clients font picoler pour tenter d’obtenir des « faveurs », ces dernières subissent la pression de devoir revenir bosser régulièrement, accepter des pratiques qui ne leur conviennent pas (par exemple, se laisser toucher quand elles sont au bar, accepter un ou des salons – et dans les pauses, ça cause de la manière de se vendre, avec tout ce que cela comporte de relations de pouvoir entre filles et aussi de conformisation à une certaine image de la femme qui marche, s’habille, parle et boit d’une certaine manière…). Comme dans tout cadre salarié, l’ambiance est souvent délétère entre des personnes qui ne se sont pas choisies, qui changent régulièrement d’espace de boulot, qui n’ont pas toujours les mêmes statuts dans le bar (certaines ayant des contrats fixant les heures de boulot et d’autres étant occasionnelles), qui n’ont pas les mêmes pratiques ni les mêmes envies et sont mises en concurrence par les clients, ces types qui n’attendent que la confirmation de leur toute-puissance dans cet univers féminin. Enfin, si l’usine est la taule, au bar on a affaire aussi à une taulière/tenancière/patronne…

Et, comme dans de nombreux lieux de travail, des portes fermées à clé, des caméras… Tout cela sur fond de descentes fréquentes de flics qui viennent rappeler que cet espace, comme tous les autres, est « sous contrôle ». Ces chiens en profitent pour tenir à jour leur fichier en prenant les identités des filles présentes. Et comme c’est une occasion pour eux de faire sentir leur pouvoir, ils en profitent pour afficher leur plus grand mépris, avec moult sarcasmes auprès des putes auxquelles il faut rappeler qu’elles sont tout en bas de l’échelle sociale. (Quand ils ne violent pas les tapins au passage.) Volonté de fichage également présente, très visiblement, lors des assises de la prostitution 2010 à Paris, ou une petite dizaine de civils attendaient les personnes à la sortie, histoire de bien repérer, noter les tronches, compléter leur vision d’un « qui fait quoi »général.

Le côté pute de la politique institutionnelle
ou : C’est pas parce qu’on est putes qu’on est forcément subversives…

«Nous n’avons pas de leçons de féminisme à recevoir de celles qui veulent notre disparition parce que nous défendons un aspect de la féminité qui ne leur convient pas. Le féminisme pute, c’est refuser de restreindre la libre disposition du corps au droit à l’avortement. Le féminisme pute, c’est sortir de la nostalgie des années 1970 pour retrouver des utopies de révolution, de transformation radicale de la société, de suppression du patriarcat. Le féminisme pute, c’est refuser de sacraliser le sexe.»

Face à l’explosion médiatique de ces dernières semaines, où journaux et associations abolitionnistes s’en donnent à cœur joie, le STRASS (Syndicat du TRAvail Sexuel) a publié un communiqué, le 2 avril 2010, pour dénoncer tout à la fois la volonté de contrôle « médical, fiscal et migratoire » de l’UMP et exiger une rencontre avec les parlementaires : « Ils devraient savoir que […] nous sommes souvent les meilleures actrices de prévention et les mieux placées pour lutter contre la traite des êtres humains ». Le syndicat n’a de cesse, depuis sa création, il y a un an, de se positionner comme interlocuteur privilégié de l’État. Et de réclamer, pour les travailleuses du sexe, un statut de citoyennes « à part entière » sur le fondement qu’elles cotiseraient auprès de l’Urssaf et pourraient accéder aux mêmes droits sociaux que les autres. Rien de bien étonnant de la part d’une instance qui s’est posée dès sa fondation comme un « syndicat » de « travailleurs ». Nous ne sommes pas naïves au point de penser que le gain de minima sociaux dont parle le STRASS concernerait tout le monde et ne se ferait pas en contrepartie d’une augmentation du contrôle de l’état. Le fait de demander des droits sociaux ne concernerait qu’une petite partie des travailleuses. Et pour les personnes sans papiers, si on suit la logique du STRASS, il faudrait ensuite demander une régularisation par le travail, ce qui a comme un air de déjà vu… On voit, depuis quelques années, des grèves de travaillereuses sans papiers très encadrées par les syndicats et qui n’aboutissent à rien, malgré des mois et des mois de « lutte ». Et quand les personnes obtiennent finalement des cartes de travail, ce sont des cartes très précaires, de courte durée et dont le renouvellement se fait à la demande du patron, ce qui muselle de fait toute possibilité de révolte. D’autre part, ces luttes ne sont pas souvent autonomes, au sens où ce sont les syndicats qui en définissent les modalités et prennent tout l’espace en étant considérés, dès le début, comme seuls interlocuteurs « légitimes » par l’État. On tourne en rond, l’État légitime des partenaires sociaux qui le lui rendent bien et n’existent que grâce à lui. La boucle est bouclée.

Faire le bordel

Cette situation me semble intéressante avec la cristallisation de plusieurs éléments en tension. Même si la prostitution ne se situe pas hors du champ de vision de l’État (identification des putes, contrôles fiscaux), il y a pour l’instant plus de marge de manœuvre ici que dans un tas d’autres endroits. Il y a quelque chose de subversif dans l’existence d’individus se revendiquant en tant que putes (qu’on se présente ou non comme féministe), ayant le culot de fonctionner sans mac, voire de s’organiser entre elles et de rejeter le salariat et le monde qui va avec (être escort pour se faire 200 euros de l’heure, travailler le moins possible et avoir la paix après). L’existence de personnes portant ce discours est d’ailleurs absente ou niée par les politiques et les associations abolitionnistes dont une partie se disent « féministes », mais ne voient, dans les personnes prostituées, que des victimes qu’il faut « ré-insérer », sortir de la prostitution et ce d’autant plus s’il s’agit de personnes d’origine étrangère ou étrangères sans papiers qui seraient toutes des victimes passives… « La question du volontariat n’est pas pertinente », ose déclarer Malka Markovich, directrice pour l’Europe de la coalition contre la traite des femmes « car ce qui amène les prostituées à accepter des relations sexuelles sans désir ni plaisir, c’est une cascade de difficulté familiales ; affectives ou économiques ».
Sans commentaire.

Laisser l’État ré-ouvrir des maisons closes, sorte d’injonction paradoxale, présenterait le triple avantage de continuer à nettoyer les rues de leurs marcheuses, filles de joie, fleurs du bitume,traditionnelles, courtisanes… bref de leurs putes, dont le voisinage incommode grandement les riverain.es, de récupérer de la thune sur leur activité et de ramener les indépendantes dans le droit chemin du salariat. Le fait que cela permettrait de lutter efficacement contre la traite des femmes s’avère nul et non avenu, puisque les femmes, éventuellement étrangères, éventuellement en situation irrégulières et éventuellement aux prises avec des réseaux de trafiquants, ne possèdent pas les permis de travail qui leur permettraient de travailler de façon déclarée dans ces établissements, pas plus que dans d’autres entreprises. Les personnes qui refusent de s’inscrire dans ces établissements et rejettent ainsi cette logique de contrôle, de nettoyage et d’aseptisation des villes seraient contraintes à davantage de « discrétion ».

Ce qui se joue ici, c’est la ré-appropriation de nos conditions d’existence de façon générale. Je ne me sens pas plus de complicité avec une pute qu’avec n’importe qui d’autre qui aurait choisit un taf pour pouvoir jouer le jeu de la consommation et capitaliser individuellement de la thune. Par contre, ce moyen d’acquérir pas mal d’argent, de façon invisible aux yeux de l’État, en fait une piste de débrouille intéressante, une ressource pour organiser un peu plus nos vies comme nous le désirons. Nous pourrions ainsi nous entraîner de façon collective à réduire nos besoins d’argent afin que, lorsque la question de la thune apparaît, ce ne soit plus une question individuelle. Nous pourrions nous demander à quoi ressemblerait une entraide pour permettre à certaines d’entre nous de faire des pauses, de rattraper le coup quand l’une d’entre nous n’a pas fait la thune dont elle avait besoin pour payer des factures… Et si nous n’avons pas, dans l’immédiat, la quantité d’argent nécessaire pour éviter aux anciennes les passes de dix euros (ou moins), nous pourrions ouvrir plus de cantines, de lieux accessibles pour manger, rencontrer des personnes, etc.

Puisque nous ne reconnaissons ni leur police, ni leur justice et que nous ne voulons rien attendre de l’État, puisque nous voulons lier la critique de l’enfermement et l’anti-autoritarisme sans rester passives face aux agressions, il est important de choisir des conditions de boulot qui laissent peu de prises pour nous agresser. Une des façons les plus efficaces de nous protéger reste de bosser à plusieurs. Et pourquoi pas louer des lieux pour ça, sans patrons et entre copines, sans devenir travailleuses pour autant, en se gardant la possibilité d’arrêter, de faire autant de pauses que l’on veut. Sur des bases claires. Sans rien lâcher de nos convictions politiques.

Mener le bal.

Quelques ingérables

maisons

 

 

Appel marche de nuit_ mai 2012

mai 1st, 2012 by e

sautAux récalcitrantes, aux passionnées, À celles qui en ont ras-le-cul de se faire emmerder, harceler, de jour, de nuit, au travail, dans la rue ou par « leur » mec. À celles qui veulent embrasser leur copine dans le bus. À celles qui ne se satisfont pas de l’univers cloisonnant du couple. À celles pour qui les relations sexuelles ne sont ni obligatoires ni sacrées. A celles qui décident de se contrefoutre des normes de beauté. Aux « garçons manqués ». À celles qui se battent contre les médecins pour être
avortées et/ou stérilisées.

À celles qui ne se laissent pas imposer fringues, horaires et mode de vie. À celles qui aiment regarder les étoiles. À celles qui refusent d’ être réductibles à ce qu’elles ont subi. À celles qui sont contre toutes les prisons. À celles qui s’organisent pour riposter aux agressions en dehors de la médiation de l’État. À toutes celles qui se croyaient fragiles et se surprennent régulièrement de leur force. A celles qui ne laissent à personne, homme ou femme, la possibilité de parler en leur nom (parti, syndicat, association).

À toutes celles qui ne veulent pas s’intégrer dans cette société, ses casernes, ses usines et ses supermarchés.

Aux survivantes, aux trop vivantes, qui ne veulent pas l’égalité mais la réciprocité des rapports. À celles qui sont pleines d’envies mais qui n’osent pas. A celles qui décident de prendre la thune là où elle se trouve. À celles qui ne reconnaissent aucune forme d’ autorité, d’où qu’elle provienne (patron, État, religions, famille, mec). À toutes celles qui ne sont pas et ne seront jamais flics,
matonnes, ou présidentes de la République. À toutes celles qui ne se ressentent pas être « femme ». À celles pour qui ne plus être dominée ne signifie pas devenir chef mais combattre tous les rapports de dominations. À celles pour qui ne pas gagner ne signifie pas être vaincue. À toutes celles qui pensent que la liberté des unes étend celle des autres.

Aux anti-autoritaires ET à celles qui sentent qu’il y a plus d’aventure à vivre dans la tentative passionnée de
détruire ce qui nous détruit que dans ces vies moroses…

Un moment pour apprivoiser, inventer et construire notre autonomie, prendre de la confiance et l’élan pour défoncer nous-même les portes sans attendre qu’on nous les ouvre, pour nous approprier la nuit et faire de la rue le lieu de nos rages.

Assez de vains soupirs immondes, finissons-en avec ce monde!

appelpetit